Coordination : Chloé Buire (LAM, CNRS) et Laura Corsi (Université de Bretagne Occidentale)
L’objectif de ce numéro est d’interroger les enjeux épistémologiques, méthodologiques et éthiques qui entourent la réalisation de films par les géographes. Cette réflexion s’inscrit dans la continuité des débats initiés lors du colloque « Le film dans la pratique de la géographie » organisé à Bordeaux du 27 au 29 mars 2018 (www.colloquefilmgeo.wordpress.com). Le colloque a en effet montré la variété et le dynamisme des initiatives de recherche qui utilisent le film à la fois comme outil de collecte de données sur le terrain et comme méthode d’écriture destinée à des publics qui dépassent les institutions universitaires classiques.
À la différence de la relative institutionnalisation des champs de « l’anthropologie visuelle » ou de « la sociologie visuelle » (voir notamment le numéro 2 de la RFMV pour la place du film dans ces disciplines), parler de « géographie visuelle » semble un pléonasme dans une discipline qui s’est construite autour de méthodes éminemment visuelles telles que l’étude des paysages ou la cartographie. En se concentrant sur la relation des géographes aux méthodes de tournage et d’écriture filmique, ce numéro ne cherche donc pas à « discipliner » la richesse des pratiques audiovisuelles des géographes mais plutôt à offrir un espace de réflexion pour :
comprendre ce que la création audiovisuelle apporte à la recherche en géographie (en termes d’outillage mais aussi en termes de construction d’un public ou d’articulation avec le monde d’images qui caractérise notre époque)
analyser en quoi certains paradigmes géographiques (le territoire, l’habiter, la corporéité par exemple) sont susceptibles de nourrir des langages filmiques spécifiques.<:p>
Nous invitons donc les contributeurs à proposer un élargissement théorique à partir de leurs expériences pratiques. La RFMV encourage en effet la mise en valeur des productions audiovisuelles (liens ou hébergements des films possibles sur le site de la revue) et est destinée à un lectorat pluridisciplinaire.
Les propositions pourront s’inspirer des grands axes suivants :
Enjeux épistémologiques et disciplinaires : Qu’est-ce qui fait un film de géographe ? Qu’est-ce qu’un film de recherche en général, et dans le champ de la géographie en particulier ? Quels sont les enjeux de la positionnalité du géographe-réalisateur par rapport à son terrain et à ses problématiques de recherche ? L’écriture filmique a ses propres codes. Quelles formes prend-elle lorsque les géographes s’en saisissent ? Que gagne-t-on, et que risque-t-on de perdre, en revisitant les normes de style et de linéarité du discours scientifique ?
Enjeux méthodologiques : Qui tient la caméra et comment ? Si, comme le suggère Sarah Kindon (2003), « most good geography (…) begins by looking », qu’est-ce que la prise en charge de ce regard par des outils audiovisuels change à la construction du discours géographique ? Quels sont les liens entre les films et les écrits des géographes ?
Enjeux sociaux : Où et comment les films de géographes sont-ils diffusés ? Quels sont les enjeux de cette diffusion ? Comment articuler réception d’un film, contribution scientifique et reconnaissance académique ? Comment valorise-t-on un film de recherche auprès de nos institutions ?